Tel était le titre de la rencontre « Culture » de l’Assemblée des Départements de France, lundi 16 juillet dernier à Avignon, organisé en lien avec Arts vivants et départements et Culture et Départements. En s’appuyant sur la Déclaration des Droits de l’Homme de 1948 et la Déclaration universelle de l’Unesco de 2001, qui reconnaît la diversité culturelle comme le « principal patrimoine de l’humanité » et sa sauvegarde comme un impératif éthique inséparable du respect de la dignité humaine, l’Observatoire de la diversité et des droits culturels a souligné dés 2007 dans la Déclaration dite de Fribourg, l’importance de l’affirmation des droits culturels pour une société.
C’est d’ailleurs en ces termes que le Président de l’ADF Claudy Lebreton a ouvert cette matinée de travail rappelant qu’au-delà des crises économiques que nous
connaissons, notre société traversait surtout une crise du sens marquée par une confiante absente envers notre futur. Sans reprendre l’ensemble des contenus de la Déclaration de Fribourg, Patrice Meyer Bisch, par image interposée, a rappelé que l’accès aux autres droits (sociaux, économiques, d’expression, …) ne peut être assuré qu’à condition que les droits culturels soient reconnus. Car ils garantissent non notre identité mais notre liberté à s’identifier comme on ne peut garantir la santé mais le droit à l’accès à la santé. Reprenant Amartya Sen, il a su rappeler que les droits humains culturels sont conducteurs de capacité (capabilité) et ne peuvent donc s’assurer sans éducation, formation et information.
Raoul L’Herminier (Vice-Président délégué à la l’enseignement, la formation et la politique de la ville du Conseil de l’Ardèche) a ouvert le débat en rappelant que les Conseils généraux étaient par excellence des collectivités "humaines" ne serait ce que parce qu’elles accompagnent, dans leurs actions politiques, "les personnes dés avant leur naissance et jusqu’à leur mort". Et c’est cette notion de transversalité sur laquelle il a souhaité insister, soulignant comment à l’origine il avait du convaincre les services sociaux de son département que les "droits culturels n’étaient pas un dispositif de plus mais une autre manière d’aborder la question des dispositifs".
Face aux difficultés sociales traduites par l’expression « réclusion sans barreau », le Président du Conseil général du Nord, Patrick Kanner, a souligné ensuite comment passer du droit à la culture aux droits culturels pouvait se résumer à passer d'une liberté formelle à une liberté réelle; leur traduction au local s’avérant ainsi être la base même d’une lutte contre les exclusions. Une posture également défendue par Isabelle Dexpert, Vice Présidente du Conseil général de la Gironde qui intervenait à sa suite. Compte tenu des fortes mutations sociales, économiques et territoriales que la Gironde connaît, de nombreuses actions, s’inspirant des valeurs de la Déclaration de Fribourg ont été engagées par le Département : Parcours de Découvertes Culturelles avec les Maisons de la Solidarité et de l’Insertion et les Maisons d’Enfance à Caractère Social, jumelages et appels à projets en direction des personnes en situation de handicap, prise en compte des nouveaux usages numériques avec les projets européens E-Coop et Sapiens et enfin, consolidation et sécurisation des parcours des artistes en situation de précarité. Elle a également rappelé comment les acteurs culturels sont parfois démunis, pour ne pas dire cyniques, quand il s’agit de parler de publics ou faire émerger leurs attentes.
Quant à la conclusion, elle est revenue à Eric Gautier, Président du Conseil général des Deux Sèvres qui, citant Edgar Morin, a rappelé que la culture devait à la fois se définir dans tout ce qui n’est pas nature mais que séparée "des cultures", elle ne pouvait exister. Le respect des droits humains, l’accès à des ressources culturelles plus larges que les seuls champs de l’art sont donc essentiels afin que la personne considérée vise son émancipation comme partie prenante de son propre développement et du développement du « commun ». Face aux questions (à l’essouflement ?) de nos politiques publiques de la culture, voilà qui peut donc « redonner du souffle », à condition seulement que nous soyons en capacité de « déplacer les bornes ».